vendredi 26 mars 2021

Touchez pas au grisbi !

 Je m'étais mis à gamberger sur la vie des grossiums qui créchaient dans ce coin.

[...] Dans cette avenue, où personne ne se déplace à pinces, que les larbins et les flics, ils étaient parvenus à se faire ménager des trottoirs comacs, plus larges que la chaussée de la plupart des rues de Belleville, avec encore des arbres et du gravier pour que les bonniches puissent commodément faire débourrer le cador !

Albert Simonin

dimanche 11 octobre 2020

Herman Melville

 Ces textes ont été écrits entre 1858 et 1860, aux Etats Unis.

"Les Mers du Sud"

    Finalement le résultat de la civilisation, dans les Iles Sandwich et ailleurs, se trouve être productif pour les civilisateurs, destructeurs pour les civilisés. On dit qu'il y a compensation, un mot très philosophique, mais cela ressemble fortement au vieil adage : "Tu perds, je gagne" : bonne philosophie pour le vainqueur.

"Le Voyage"

    Pour ce qui est des bienfaits du voyage : en premier lieu débarrassez-vous de quelques préjugés. [...]

Celui qui a des préjugés sur la couleur de la peau découvre plusieurs centaines de millions de personnes de toutes les nuances de couleurs possibles, de tous les degrés d'intelligence, de tous les niveaux et milieux sociaux, des généraux, des juges, des prêtres, des rois, et apprend à renoncer à son stupide préjugé.

à bord, Finitude, 2004 (traduction Guy Chain)

lundi 17 août 2020

André Dhôtel

 Hector Joras est propriétaire du château de Marcoux et de la scierie.

"Hector [...] s'était engagé dans une politique socialiste modérée [...]

Par ailleurs, Hector Joras s'intéressait aux conditions d'hygiène de l'ouvrier (comme on dit le lion ou la panthère), mais on prétendait que c'était sa femme qui composait ses discours et ses articles." 

André Dhôtel, L'Homme de la scierie

vendredi 31 juillet 2020

Balzac

Après l'argent, le pouvoir...


- Bravo ! répliqua Taillefer. Vous comprenez la fortune, elle est un brevet d'impertinence. Vous êtes des nôtres ! Messieurs, buvons à la puissance de l'or. M. de Valentin, devenu six fois millionnaire, arrive au pouvoir. Il est roi, il peut tout, il est au-dessus de tout, comme sont tous les riches. Pour lui, désormais, LES FRANÇAIS SONT EGAUX DEVANT LA LOI est un mensonge inscrit en tête de la Charte. Il n'obéira plus aux lois, les lois lui obéiront. Il n'y a pas d'échafaud, pas de bourreaux pour les millionnaires !

Balzac, La Peau de chagrin


lundi 27 juillet 2020

Balzac

Victor Hugo le disait le 21 août 1850, lors des funérailles de Balzac :
"A son insu, qu'il le veuille ou non, qu'il y consente ou non, l'auteur de cette œuvre immense et étrange est de la forte race des écrivains révolutionnaires."

Il se voulait clérical, légitimiste, il a inspiré les progressistes du monde entier en peignant la société du XIXème siècle, société de l'argent, qui est encore la nôtre.


"Hélas! nous ne manquons jamais d'argent pour nos caprices, nous ne discutons que le prix des choses utiles et nécessaires. Nous jetons l'or avec insouciance à des danseuses, et nous marchandons un ouvrier dont la famille affamée attend le payement d'un mémoire. [...] Il semble que nous n'achetions jamais assez chèrement les plaisirs de la vanité."
Balzac, La Peau de chagrin



mardi 21 juillet 2020



(... à la suite de quoi il (celui qu'on avait ainsi chassé de chez lui) avait compris ce que d'ordinaire les gens ont quelque peine à admettre, à savoir que le droit n'est pas une question de morale ou de justice discutée par des philosophes et appliquée par des parlementaires ou des assemblées mais, en fait, une simple affaire de conventions et que la seule légalité conforme à la nature des choses consiste à posséder un revolver en face de quelqu'un qui n'en possède pas)

Claude Simon, Les Géorgiques, IVe partie (la guerre d'Espagne)

vendredi 5 juin 2020

Je crois au pouvoir de la douleur...


Rien n’est plus normal au bout du compte que la douleur. L’étrange est parfois qu’on l’oublie. D’avoir goûté à cet état d’inconscience donne à la plupart des gens le sentiment qu’il est naturel, et que la conscience du mal qu’on porte en soi tout au contraire est une maladie qu’il faut chasser. D’où ces cris, ces protestations que je rencontre quand je parle suivant mon triste cœur, cette prétention qu’on a de m’imposer comme un devoir un perpétuel optimisme. Je ne connais rien de plus cruel en ce bas monde que les optimistes de décision. Ce sont des êtres d’une méchanceté tapageuse, et dont on jurerait qu’ils se sont donné pour mission d’imposer le règne aveugle de la sottise. On me dit le plus souvent que l’optimisme est un devoir, parce que si nous voulons changer le monde, il faut croire d’abord que c’est possible. […] Je sais cependant que si vous voulez changer le monde, vous ne le ferez pas sans l’aide puissante de ceux qui ne se sont pas fait pour règle de conduite la pratique d’avance décidée de l’aveuglement. Je crois au pouvoir de la douleur, de la blessure et du désespoir. Laissez, laissez aux pédagogues du tout va bien cette philosophie que tout dément dans la pratique de la vie. Il y a, croyez-moi, dans les défaites plus de force pour l’avenir que dans bien des victoires qui se résument le plus souvent qu’à de stupides claironnements. C’est de leur malheur que peut fleurir l’avenir des hommes, et non pas du contentement de soi dont nous sommes perpétuellement assourdis.

Aragon, La Valse des adieux