mercredi 13 mai 2020


DE LA GOURMANDISE

J’ai parcouru les dictionnaires au mot Gourmandise, et je n’ai point été satisfait de ce que j’y ai trouvé. Ce n’est qu’une confusion perpétuelle de la gourmandise proprement dite avec la gloutonnerie et la voracité : d’où j’ai conclu que les lexicographes, quoique très estimables d’ailleurs, ne sont pas de ces savants aimables qui embouchent avec grâce une aile de perdrix au suprême pour l’arroser, le petit doigt en l’air, d’un verre de vin de Lafitte ou du Clos-Vougeot. […]
Définissons don et entendons-nous.
La gourmandise est une préférence passionnée, raisonnée et habituelle pour les objets qui flattent le goût.
La gourmandise est ennemie des excès ; tout homme qui s’indigère ou s’enivre court risque d’être rayé des contrôles.
La gourmandise comprend aussi la friandise qui n’est autre que la même préférence appliquée aux mets légers, délicats, de peu de volume, aux confitures, aux pâtisseries, etc. C’est une modification introduite en faveur des femmes et des hommes qui leur ressemblent.
Sous quelque rapport qu’on envisage la gourmandise, elle ne mérite qu’éloge et encouragement.

Brillat-Savarin, Physiologie du goût

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire