Les incipit de Colette (7)
Un mois de mai de la guerre.
L’Empyrée-Montmartre, pour jouer sa grande revue de printemps Ça
gaze !, a engagé dix-huit jeunes femmes, un petit compère « faible du
poumon », un tragédien octogénaire pour les rôles indispensables du Père
La Victoire, du Grognard de Raffet et du général Joffre.
Mitsou
*
« Léa ! Donne-le-moi, ton collier de perles ! Tu
m’entends, Léa ? Donne-moi ton collier ! »
Aucune réponse ne vint du grand lit de fer forgé et de cuivre
ciselé, qui brillait dans l’ombre comme une armure.
« Pourquoi ne me le donnerais-tu pas, ton collier ? Il
me va aussi bien qu’à toi et même mieux ! »
Au claquement du fermoir, les dentelles du lit s’agitèrent, deux
bras nus, magnifiques, fins au poignet, élevèrent deux belles mains
paresseuses.
Chéri
*
Pas de pétrole,
Pas de l’essence,
Pas de la bougie
Quel-le malheu-re !
En sautant d’un pied sur l’autre, en chantant à pleine
voix, ainsi Bel-Gazou va, propageant l’expression de la triste vérité. C’est un
fait : le pétrole manque à Brive et à Varetz l’essence a vécu, la bougie
coûte quatre francs vingt-cinq la livre, et devient rare…
La Chambre
éclairée
*
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