Les tenants de
ce qu’on a appelé le Nouveau Roman affirmaient que ces œuvres n’étaient pas de simples
accidents mais le développement naturel d’un art autonome… Que le roman est un
art comme les autres et que, comme les autres, pour vivre et se développer il
doit constamment se transformer, découvrir un nouvel ordre de sensations et de
nouvelles formes, abandonner des conventions devenues inutiles, gênantes, et
créer de nouvelles conventions qui seraient abandonnées à leur tour.
Ils affirmaient
que, le roman étant un art comme les autres, la substance dont il est fait, le
langage, en est l’élément essentiel.
Curieusement,
cette affirmation, fondée sur une évidence, a provoqué et provoque encore
beaucoup d’indignation et de levées de boucliers.
Et pourtant, ne
suffit-il pas d’ouvrir n’importe quel roman, à n’importe quelle page, pour
juger de sa qualité, sans avoir besoin de suivre le développement de l’intrigue
ni de connaître les personnages ?
N’est-il pas
évident que, si intéressantes, si excitantes que soient les histoires qu’il
raconte, si vivants que soient, ou paraissent être, ses personnages, quelque
chose d’essentiel sépare le roman-œuvre d’art du roman tout court. Sépare,
disons, pour prendre des exemples dans la littérature américaine, Le Bruit
et la Fureur d’Autant en emporte le vent.
Nathalie Sarraute, Le Langage dans
l’art du roman
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